Tu l’aimes, Enyo. Tu as beau lui envoyer des piques à tout va, lui tenir parfois des discours que d’autres, à sa place, trouveraient douloureux ou humiliant. En faite, si elle était là pour t’entendre, tu te doutes que la jeune femme aurait étiré encore plus fort les lèvres avant de te rendre la pareille. Il n’y a pas à dire, Léandre, vous n’êtes pas lier par le sang et la famille pour rien, tous les deux. Et quand tu regardes la jeune Jakobsen devant toi, et bien tu remarques clairement les similitudes entre elles deux.
Ceci dit, tu peux rapidement même l’observer plus clairement, puis qu’elle vient coller son fessier sur ton bureau, à côté de toi, et qu’elle rebondit sur ta question à propos des mutants. Tu te doutes qu’ils ne sont pas nombreux les soldats qui t’apprécie pour ce gêne que tu portes en toi, mais tu as plus souvent fait face à l’indifférence qu’à la haine. Ca t’amuserait presque si elle se mettait à te détester pour ça, mais quand la réponse vient, elle chasse ce doute et tu hoches la tête, en acceptant ses mots.
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C’est vrai pour tout le monde, Léandre, tu le sais. Toi, tu as beau être un mutant, un noble, avoir eu une éducation et un parcours presque sans faute, et bien tu as aussi ce manque. Celui de ne pas être né dans la bonne branche. Être un Stellaa qui ne régnera jamais, c’est l’un des grands des espoirs de ton père et ça s’est inscrit en toi en lettre de feu. C’est bien pour ça que tu ne lâcheras jamais ton poste.
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Tu as particulièrement accentué ce dernier mot, en ravalant ton rire sous un sourire en coin, pour lui rappeler qu’elle a encore du chemin pour se hisser à ton niveau. Tu as une bonne dizaine d’années de plus qu’elle et tu comptes bien en garder au moins autant à la tête des Forces Armées. La retraire, très peu pour toi… le jour où elle prendra ta place, si elle y parvient, c’est qu’un titan t’a bouffé, c’est tout.
Et la voilà qui se penche, te cherche. Toi qui y réponds en agrippant son menton et en la tirant vers toi. Si quelqu’un arrivait maintenant, on pourrait croire tout autre chose que cette confrontation de deux trop gros égaux qui se renifle sans savoir s’ils doivent s’attaquer, et dans le fond, ça te plait que l’on puisse se méprendre. Tu aimes jouer des situations, Léandre, c’est comme ça. Il te faut pourtant entendre sa question, pour savoir si tu vas la relâcher, pour te secouer un peu. Tu as le culot d’approche encore, comme si tu allais lui voler autre chose de bien moins militaire, mais tu t’arrêtes sans le faire.
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Et tu la relâches, la repousses légèrement pour retourner au fond de ton siège, ton verre de cognac dans la main. Tu sirotes le liquide de bon cœur, en l’observant sans ciller. Que vas-tu faire de cette femme Léandre ? La surveiller ? Lui mettre des bâtons dans les roues ? Ou choisir de la former pour reprendre ton poste, le moment venu ?
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