Comment est-ce que tu as pu en arriver là, sérieusement ? Tu n’as jamais été méchant, Aedan, tu as un sale caractère, oui, mais ça, on t’a toujours dit que de toute manière, tu ne pouvais rien y changer, et qu’il était simplement inscrit dans ton code génétique. Par contre, tu peux carrément te vanter d’être bien différent des autres de ton sang, tu n’as pas aussi acéré qu’ils peuvent l’être, tous autant qu’ils sont, disons simplement que tu ne vois pas cette jeune femme sous le meilleur jour qui soit, que le simple fait de savoir qu’elle est là du fait de ton aîné t’agaces profondément et que, si visiblement, tu as su faire des efforts pour parvenir à être aimable, la moindre contrariété à suffit à te faire sortir de tes gonds. Il n’est pas étonnant qu’elle prenne aussi mal ton comportement, tes menaces, et le ton que tu viens d’utiliser avec elle, tu le sais, parce que c’est le genre de comportement que tu critiques toujours bien ouvertement quand il apparait chez Rohan, chez Léandre, parfois même chez Lucian quand bien même il n’a une goutte de sang en commun avec vous. Alors, oui, elle s’en va, et très honnêtement, tu aurais dû la laisser faire … tu ne la retiens que parce que tu ressens cet état d’énervement, et parce que tu sais qu’à cause de ton comportement, elle est en train de se mettre volontairement en danger. Tu ne sais pas agir correctement, tu n’as jamais appris à faire avec le caractère des autres, alors, tu fais ça dans la violence, quand bien même encore une fois, tu aurais simplement mieux fait de t’expliquer clairement et calmement.
Tu oses donc la toucher, oui, tes doigts se referment fortement sur son poignet, peut-être au point de lui faire mal, mais tu ne fais pas attention à ça non plus, et dans la foulée … elle se met à hurler, Aedan. Tu ignores royalement les quelques passants qui observent la scène d’un œil surpris, tu t’accroches alors qu’elle est en train de se débattre, tu es bien trop fier pour faire marche arrière, t’arrêter, et la laisser tranquille, alors, pour ce qui est de s’excuser, n’en parlons pas. En plus, mon vieux, elle pleure maintenant, alors … tu te retrouves complètement figé, à la retenir, droit comme un « i » et le visage affreusement impassible. La vérité ? Tu ne sais pas faire avec les larmes d’autrui, surtout pas celles d’une femme. Il faut probablement de la douceur, de la patience, tout ce que tu ne possèdes assurément pas. En fait, il est bien possible que la détresse d’Alyth te touches, quelque part, mais que pourrais-tu faire, hein ? Tu n’es pas le mieux placé pour lui venir en aide d’une quelconque manière.
La suite de cela n’est que dérapages en série. Comme promis, elle attaque, elle sort une arme de ses affaires, et bon sang, quand tu vois ce stylet, à la lame si caractéristique, ton corps entier se tends, ton visage se crispe, ton cœur se serre. Il a osé, Aedan, et ça te mets dans une telle rage, que tu bouges violemment lorsqu’elle essaie de te frapper, si bien que par un bien étrange concours de circonstances, elle se blesse, elle, toute seule, avant de relâcher cette arme de malheur et de juste … chouiner. Oui. C’est comme ça que tu le vois. Du coup, tu l’attrapes, tu la tires à toi, et si tu penses à la frapper, pour l’assommer, tu ne fais finalement que la placer devant toi, dos contre ton torse tandis que ta main vient se placer sur sa bouche pour la faire taire. Ce n’est pas délicat, encore une fois, mais tu veux simplement qu’elle cesse d’agir comme elle le fait actuellement. Ensuite, tu recules, et quand tu en as l’occasion, tu bouges, tu la remets face à toi, et tu la jettes littéralement sur ton épaule, maintenant ses pieds pour éviter de prendre un mauvais coup, tu pousses l’arme, puis ses affaires à l’intérieur d’un coup de pied avant d’entrer à ton tour, de refermer la porte, et de monter l’escalier.
C’est dans la chambre, la fameuse chambre laide, que tu entres pour littéralement la balancer sur le lit, avant de reculer. « Fermez là, maintenant. » Que tu ordonnes, en passant une main sur ton visage, bien conscient de ce que tu viens de faire. « Et tenez-vous tranquille une minute ! » Tu ajoutes, avant de soupirer, de reculer, et de te laisser glisser contre le mur, à l’opposé, pour te reprendre, au moins un peu. « Quand vous serez redevenu un être humain, on pourra regarder votre bras avant que vous ne vous vidiez de votre sang. »